jeudi 20 avril 2017

Lettre à celle qui lit mes romances érotiques, et qui devrait arrêter tout de suite de Camille Emmanuelle



Résumé :

" L'homme est blanc, dominant, riche, musclé, performant sexuellement et pénétrant. La femme est blanche aussi, pauvre, pénétrée, elle attend qu'un homme la comble sexuellement (et si possible la comble aussi de cadeaux). " 

Les romances érotiques se suivent et se ressemblent : la femme et l'homme répondent à des stéréotypes étriqués, leurs interactions sont autant simplistes que convenues et le désir féminin doit se cantonner à quelques clichés hyper réducteurs.
Quant aux maisons d'édition friandes de ce genre littéraire, qui séduit de plus en plus de lectrices, elles empruntent à la production industrielle ses méthodes et ses cadences. Saviez-vous que chaque personnage doit avoir une blessure secrète ? Qu'il y a des tapis en poils de bête sur lesquels il ne fait pas bon faire l'amour ? Que six jours peuvent suffire à écrire une romance ? Ou encore que chaque personnage a une " fiche " consignée sur un tableau Excel ?... " 

 Camille Emmanuelle, qui a écrit sous pseudo une douzaine de romances érotiques, nous ouvre les portes de ce genre littéraire qui, à force de favoriser une sexualité normalisée, devient un obstacle à une réelle libération sexuelle de la femme. Avec la verve qui la caractérise, elle dénonce l'éternelle comédie qu'on veut, encore, faire jouer à l'homme et à la femme. 

Mon avis :

Je me souviens que lorsque ce livre est paru, cela a créé une tempête sur Facebook parmi les lectrices de romances. Elles fustigeaient l’auteur car, selon elles, Camille Emmanuelle se permettait de les juger et de les prendre de haut. Pire, elle crachait sur un genre littéraire et donc sur toutes ces lectrices.
En voyant cela, j’ai non seulement été curieuse de lire ce livre (contrairement à toutes celles qui le critiquaient sans l’avoir lu) mais j’étais aussi très amusée. Oui amusée car, au final, peu importe ce que telle ou telle personne pense de mes lectures, cela ne va pas m’empêcher de continuer à lire ce qui me plaît sans entrave. 

C’est donc avec plaisir et curiosité que j’ai retrouvé Camille Emmanuelle. Franchement, les filles, vous êtes complètement à côté de la plaque dans votre colère, vous vous êtes trompées de cible. L’auteur ne vous attaque pas, loin de là, elle veut se battre pour vous afin que vous ayez de la qualité entre les mains.
Le problème n’est pas la romance en tant que genre mais la pauvreté que nous vendent les maisons d’éditions : toujours le même schéma, toujours les mêmes personnages… Toujours le même plat que l’on nous sert. Certes, il est souvent plaisant (et je suis la première à l’admettre sans honte) de lire un livre « sans surprise » quand je veux me détendre car, tout comme les autres lectrices je sais faire la part des choses et prendre du recul, mais j’aime aussi pouvoir accéder à des romances un peu plus « haut de gamme » niveau qualité où l’on va m’offrir de nouveaux territoires à explorer.
Qu’est-ce que la lecture si ce n’est un voyage vers l’inconnu ?

Camille Emmanuelle parle de ces stéréotypes de la romance en toute connaissance de cause puisqu’elle en a elle-même écrit pour payer ses factures. En soi, ce n’est pas le genre qui la dérange mais toutes les restrictions et obligations qu’on lui a imposé. Déjà, et je trouve ça ahurissant, on lui a imposé un nom et une biographie inventés de toutes pièces car visiblement, les lectrices veulent des auteurs femmes américaines de moins de 30 ans, cela fait plus rêver parait-il…bah voyons !
Puis, aucune possibilité pour elle d’écrire librement, tout est scruté à la loupe par ses éditrices : faut pas que ce soit trop intello, faut pas que ce soit trop dur, attention sexe sans tâche où on ne nomme pas une bite, où la femme ne se touche pas…Toujours sous le sacro-saint adage de « c’est ce que veut la lectrice », vraiment ?
Encore une fois, de temps en temps why not mais tout le temps ? Pour ma part, non ! 

J’adore lire car chaque livre à une saveur particulière, différente des autres. Chaque livre m’emmène ailleurs : parfois dans de la fantasy, parfois dans l’horreur, parfois dans la pornographie, parfois dans la romance… Je suis adulte, je sais dire ce dont j’ai envie. Ce ne sont pas aux maisons d’éditions de décider de ce que doivent lire les femmes surtout si c’est pour les abreuver de romances stéréotypées et plates (sérieux le mot « bite » ne va pas me faire prendre le voile).

Nous, les femmes, comme les hommes, nous méritons une littérature de qualité et diversifiée, quelque soit le genre. Nous méritons d’avoir le choix, nous méritons le respect des maisons d’éditions et de l’honnêteté (clairement je m’en fous que l’auteur soit américaine, espagnole ou de Dunkerque). Nous méritons que l’on arrête de nous prendre pour des crétines puritaines.
Lire, c’est comme manger, il doit en avoir pour tous les goûts mais que cela soit toujours cuisiner avec plaisir car c’est cela qui donne toute la saveur au plat.

Merci à Camille Emmanuelle qui, dans son style toujours aussi drôle et positif, pointe une nouvelle fois les travers de notre société via le prisme de la littérature dite « féminine » (d’ailleurs amis hommes, faites-vous plaisir si vous avez envie d’en lire).
Et lectrices de romances qui êtes outrées par ce livre…commencez par le lire avant de monter sur vos grands chevaux.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire